
Dans ce nouvel épisode nous vous proposons d’illustrer nos propos en prenant appui sur 3 retours d’expériences. Au travers de 3 exemples de réhabilitation différentes, nous aborderons, le cadre réglementaire, les difficultés, les enjeux voire les surprises qui se nichent derrière chaque coup de pelle…
La vie d’une carrière est définie au moment de l’autorisation environnementale. La remise en état doit être précisée, tout cela entre donc dans un cadre très réglementaire, notamment depuis 1976. En effet, la réglementation en matière d’environnement pour les activités dites polluantes a été établie à cette date. Et ceci n’est pas sans poser quelques problèmes. Sur certains sites, l’extraction peut durer une centaine d’années avec des arrêtés préfectoraux de plus de 30 ans. Le principe de remise en état étant figé dans ce document, il arrive régulièrement que les parties prenantes souhaitent une modification du projet (évolution des attentes en termes d’usage, de technique, voire de réglementation).
Concernant les gravières, l’enjeu principal est la ressource en eau. D’un point de vue quantitatif, on prendra notamment en compte le risque inondation et l’impact sur les niveaux des nappes alluviales, tant lors de l’exploitation que lors du remblaiement. D’un point de vue qualitatif, il y a en fait peu d’incidence lors de l’extraction. En outre, certaines études démontrent même que les lacs de gravières contribuent à la dénitrification des eaux souterraines. Dans les opérations de remblaiement, des contrôles sont réalisés sur les matériaux inertes extérieurs afin de s’assurer de leur caractère figé et garantir, ainsi, une traçabilité permettant de localiser les matériaux après leur mise en remblais.
Cela implique donc une réelle prise en compte de la contrainte environnementale, au sens strict.
Retours d’expérience avec 3 exemples concrets
Réhabilitation de la carrière de Grenade sur Garonne :
Il s’agit d’un site en gravière, remis en état à 100 % en terre agricole ; il ne reste qu’un petit lac pour la pêche. Une trentaine d’hectares de terre agricole a donc été replacée lors de la remise en état, il y a 5 ans. Les résultats de culture sont plutôt satisfaisants.
Sur ce chantier, un terrassier a réalisé le projet avec le logiciel de conception MENSURA GENIUS afin d’améliorer les écoulements des eaux. Cette prise en compte de la topographie, de l’écoulement des eaux et plus largement de la modélisation de la remise en état d’un site de ce type est très récente chez les carriers. Cependant, cette manière de faire a un bel avenir devant elle, nous en reparlerons dans un prochain épisode.
Réhabilitation de la carrière de Verdun sur Garonne
Cette gravière est encore en exploitation mais la remise en état a été faite de façon coordonnée et finalisée sur un secteur. Sur cette partie, un lac naturel est prévu.
Une autre partie est en cours de remise en état. Il s’agit d’un lac destiné à la pêche pour lequel des discussions vont avoir lieu avec la commune et la fédération de pêche afin d’adapter la remise en état à l’usage. Le rôle du carrier est donc également d’échanger avec la commune et les autres parties prenantes. Dans ce cas de figure, le rôle de Romain Marty est aussi de faire de la médiation.
Réhabilitation de la carrière de Lezigan-la-Cèbe
Nous allons exposer ici le cas d’une carrière en roche massive, exploitée par la société CTSO. Le basalte a été exploité dans cette carrière pendant une centaine d’années. La remise en état a débuté en 2013. Il existait un vieil arrêté préfectoral sans projet précis qui consistait à taluter légèrement les fronts avec quelques zones humides : des choses très basiques en somme. Une remise en état a donc été adaptée avec l’accord des communes concernées.
Aujourd’hui, la quasi-totalité du site est remise en état avec notamment un parc photovoltaïque au sol et une étude est en cours pour en faire un autre. Il s’agit d’une remise en état très satisfaisante d’un point de vue environnementale, car les inventaires réalisés pour le projet photovoltaïque ont montré que de nombreuses espèces se sont installées comme le Grand-Duc, l’Outarde Canepetières… Des espèces avec une belle valeur patrimoniale.

Sur ce projet toujours, un lac a été créé pendant l’exploitation sur une partie de la carrière. Celui-ci est alimenté par les eaux de pluies. Grâce à lui, le village de Lézignan, qui était très souvent inondé par des coulées de boues se produisant dans un axe précis, s’est retrouvé protégé de ce phénomène catastrophique. En effet, le talweg (zone d’écoulement des eaux en cas de forte pluie) qui les générait avait été entrecoupé par la carrière et a formé ce lac. Cet aménagement, réalisé il y a de nombreuses années, serait difficilement possible aujourd’hui, du fait des évolutions réglementaires, car la loi sur l’eau empêcherait probablement de couper le talweg.
« Année N, vous démarrez un projet sachant que son exploitation se terminera après 10 ans d’exploitation. Vous devez tenir compte d’études environnementales régulières, des recommandations des associations de protection de la nature que vous invitez sur vos sites. Entre-temps une commune qui souhaitait au départ une base de loisirs a changé d’idée et préférera au final une zone naturelle. Tout cela est donc très variable et il est nécessaire de faire évoluer le projet » précise Romain Marty.
La réhabilitation des carrières est donc un sujet très changeant, pour lequel il faut tenir compte des cohérences du moment. La grande tendance actuelle nous vient du photovoltaïque (au sol et flottant). Les carriers sont, en effet, très sollicités pour cet usage de production d’énergie verte, qui, outre la production réduit de fait l’évaporation du lac, apporte plus d’ombre et donc une eau moins chaude et de meilleure qualité. Tout cela permet d’avoir de nouveaux leviers pour la remise en état. Les professionnels doivent donc aussi s’adapter aux innovations sociétales et techniques.
Pour conclure cet épisode
La réhabilitation des carrières nécessite de grandes facultés d’adaptation. Les attentes sociétales ont énormément changé et ne cessent d’évoluer. Avant les communes demandaient beaucoup de bases de loisirs, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui, car cela coûte cher, nécessite beaucoup d’entretien et de surveillance. La tendance est résolument tournée vers l’écologie afin de créer par exemple des zones de quiétudes, sans aucune activité sur des dizaines d’hectares rendus inaccessibles, et garantir le développement de la biodiversité.
Ceci nous amène donc à notre prochain épisode : Les carrières créatrices de biodiversité.
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